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18 octobre 2015 7 18 /10 /octobre /2015 11:57
Nico sur le podium des 100 miles !
 

Pour son premier Ultra, Nicolas a tapé fort !!! : 5e sur le 100 miles Sud de France ! superbe perf !

Ancien rugbyman et skieur alpin, cet Ariégeois du Couserans combine ses études de médecine (il est en 5e année) et sa grande passion pour la montagne et tous les sports outdoor ! Il a commencé le trail il y a juste un an par la course des Novis (25 km en bas du Mont Calm) et puis il a enchaîné les compets en raid, en ski de rando et là, grande culbute dans le monde de l'ultra avec les 100 miles sud de France ! Son plan d'entraînement = néant !! ça, c'est ce qu'il dit !! certes sur le papier, il n'y a rien !! mais Nicolas a "mangé de la montagne autant que possible !!". Ses terrains d'entraînement préférés : du Mont Rouch au Maubermé, en passant par le Valier, la Barlonguère certescan, la pique rouge de Bassies ... bref pas de plan bien défini, mais des milliers de mètres de déniv avalés !! et ça a très bien payé !!

Retour avec Nicolas sur sa très belle et mouvementée course de Font-Romeu à Argelès sur Mer :

L'appel de la course !


Un matin j'ai ouvert les yeux et la première chose que je me suis dite étais « vas y, tu t'inscris ». S'inscrire aux 100 miles a été comme arracher un sparadrap, un geste vif où l'on serre les dents, en sachant qu'une fois l'inscription validée il allait falloir tenir la distance. A savoir que m'étant mis à courir depuis assez peu de temps, faire 170 kilo, d'une traite, sur mes bushidos me paressait assez osé, sinon totalement irréalisable il y a encore quelques mois de ça.

Parti de Toulouse dans l'après midi, la veille de la course, je me gare donc en face du gymnase de Bolquère-pyrénées 2000, petite bourgade catalane jouxtant Font Romeu, terre de champions et seule station de ski pouvant se targuer d'être assez plate pour avoir un téléski pouvant se prendre dans les deux sens (gratuit, mais true story !) pour aller récupérer mon dossard et dormir un peu avant le départ du lendemain.

Quelques plats de pâtes et heures de sommeil plus tard je suis prêt, ultra stressé, mais résolu à en découdre avec mes guibolles jusqu'à mettre les pieds dans la Méditerranée. Le ciel est bleu et le soleil nous fait oublier les quelques 1° des 1800m d'altitude de Bolquère.

Attention à la tension du départ !!

Jusqu'ici tout va bien, jusqu'au moment, où, sur un faux mouvement, je ressens une violente douleur le long de ma colonne vertébrale. Étant abonné aux dorsalgies depuis quelques années, j'ai trop peur de m'avouer ce que cette douleur veut vraiment dire. J'essaie de m'échauffer, de m'étirer, rien n'y fait. A chaque fois que je pose un pied par terre ou que je tourne la tête, la même aiguille s'enfonce entre mes omoplates et me fait serrer les dents. 10 minutes avant le départ je me dirige vers l'organisateur de la course pour lui signaler que je déclare forfait. En l'état d'esprit du moment ; « putain c'est vraiment trop con ! ». Et là, le mini miracle de ma journée, il se trouve qu'un ostéopathe passant par la (il était en fait 2nd relais sur l'ultra traversée) m'interpelle et me dit «attends, je vais regarder ça». Tout n'était pas encore perdu. Bref, l'ostéo me débloque le dos à 9h55 a.m, à 10h00 le pistolet de départ claque et nous nous élançons pour cette traversée, certains détendus, d'autres sérieux, moi en croisant les doigts pour que mon dos tienne la route ! Contrairement à mon habitude je ne « fais pas le départ », je reste un peu en retrait en regardant la tête de course s'éloigner doucement. De toutes façons après la mésaventure de ce matin, le seul et unique objectif :

est d'arriver au bout, peu importe le chrono !

Après quelques 13 km dans les bois nous arrivons au village de Planes, c'est là que l'on va commencer à attaquer la montagne. D’ailleurs il était temps, parce que les sous bois c'est sympa, mais ce n'est pas pour ça qu'on a signé hein. Direction la vallée de la Carança, pays de Michel Rabat, énorme coureur de montagne et vigneron de sa région (dont je conseille d'ailleurs, vivement le vin), puis descente sur Mantet et sur Vernet les bains (1ère base de vie 53km 2500D+ 7h30 de course). j'arrive dans la BDV je prend mon sac, refait le plein d'eau, mange un morceau, 10 mn chrono je redécolle, frais patate, mon dos tient le coup et tiendra encore jusqu'à la fin maintenant j'en suis sur. J'avais mis les freins jusqu'à maintenant et je me dis que je vais pouvoir peut être lâcher un peu.

La montagne enfin !

Direction le refuge des Cortalets 1300m plus haut, enfin une bosse qui ressemble à quelque chose, contrairement à beaucoup de coureurs, je suis très lent et me fatigue énormément sur le plat où il faut mettre du rythme, cette montée est le moment parfait pour me reposer un peu. Le départ de la 110km ayant été donné 30 mn avant mon arrivée à Vernet, je commence rapidement à dépasser les derniers concurrents, ça fait du bien de voir du monde, on parle un peu, on s'encourage et les batteries sont ré-remplies pour les kilomètres suivants.

Le refuge passé, avec un autre coureur, rattrapé dans la montée, nous descendons sur Batère. Le terrain est roulant et mon compagnon commence à augmenter le rythme, je l'accroche. Nous continuons à parler en courant, et évidemment quand on fait disserter 2 trailers sur une course après 60km, ils ne parlent pas métaphysique, ils parlent trail ! Et c'est dans ce thème que mon concurrent me glisse qu'il a fait les templiers et par la même occasion qu'il y a fini 20ème ! Je ralenti quasi instantanément ! Impossible de suive un mec comme ça sur le plat. Dernier coup de Q avant Batère je rattrape Mr Templier dans une montée faite de gros éboulis, qu'un toulousain qualifierait de « technique ». A défaut de courir plus vite, mes chevilles étant plus solides que les siennes je commence à imposer un petit rythme de montée à l’ariégeoise et le distance petit a petit. Arrivé a Batère, ravito, bouillon/pâtes, je redécolle instantanément et entame, bon rythme, la descente. Quelques kilomètres plus tard je sens que mon estomac commence à bouger dans mon abdomen, je décide de ne pas lui apporter l'attention qu'il demande, on ne va pas se laisser ralentir par un organe.

Coup de moins bien...

Encore quelques foulées, je ne peux plus ignorer mon estomac et commence à vomir tout ce que je peux, bref je suis au fond du seau. Les coureurs me doublent l'un après l'autre, me demandant tous si ça va, si j'ai besoin de quelque chose … je dois vraiment avoir une mine horrible pour inspirer toute cette compassion. Malgré moi, l'estomac vide, apparemment c'était les pâtes qui n'avaient pas eu le temps de passer, je continue à avancer tant bien que mal. Je regarde ma montre ; 88km, selon le road book, plus que deux kilo avant Arles sur Tech. Km 90, pas de Arles en vu, je continue un pas après l'autre, je vais bien finir par arriver. Grignotant une barre de céréales et tirant sur ma flasque remplie d'iso ultra concentré, j'essaie de me ressucrer. Mes jambes pèsent une tonne et pour la première fois me vient l'idée d'abandonner. C'est ça, j'arrive à Arles et j’arrête, je dormirai, ça ira mieux demain …
Au kilomètre 96 (15h de course, 4500D+ 1h00 a.m environ) j'arrive à la BDV d'Arles, je sors mon portable et appelle un groupe d'amies alors tranquillement affairées, à l'atelier de l’écharpe (Toulouse), à boire des cocktails … mais qu'est ce que je fais là ??

Mais ça repart !!

30mn, un remontage de moral et un refaissage de cerise plus tard je décide de repartir en direction du Perthus, par ce que bon, abandonner par ce qu'on est fatigué, tout simplement ; ça ne se fait pas ! La première monté se passe bien, je me sens de mieux en mieux, arrivé en haut c'est bon j'ai « recouvré mes jambes » ! l’expression est quand même un peu forte, les jambes retrouvées depuis peu ont quand même 100 bornes au compteur et une paire de rechange n'aurait pas été de trop, enfin je suis reparti et je re-file vers la mer. Je suis seul. Les montées et les descentes s’enchaînent dans un silence uniquement troublé par le bruit de mes pas, je ne sais plus quelle heure il est ni combien de temps je vais encore courir, mais je cours. le vent tiède du sud frôle mon visage. En contrebas, des deux cotés, de grandes taches de lumière brillent dans la nuit. J'enlève ma veste, il fait bon. Entre la France et l'Espagne, entre la lumière des villes et des étoiles, j'avance hors du temps. Quelques minutes, quelques heures encore, la nuit touche à sa fin, un soleil rouge se lève à l'est et dessine les crêtes des derniers sommets des pyrénéens.

Dernière base de vie

J'arrive au Perthus (24h de course, km 140 6700D+), à chaque foulée une douleur aiguë irradie de mes pieds jusqu'à mes cuisses. Il va falloir se reposer un peu avant de repartir. La base de vie fourmille de coureurs et de personnes venus les encourager, je rallume mon portable et le pose sur la table le temps d'aller chercher de quoi carburer pour les derniers 35km. A mon retour je lis tous les messages d'encouragement reçus pendant la nuit … remonté à bloc je laisse le maximum d'affaires sur la base et je repars léger, attaquer les Albères. J'entame la piste forestière me menant au col des 3 hêtres. Je savais, pour l'avoir déjà fréquentée (cf alberatrail Hugo Crovello) que cette piste était longue, mais là elle est interminable, heureusement j'avance maintenant avec trois catalans, partis sur la 110, avec qui finalement cette piste ne paraît plus si dure que ça. Il fait beau, le soleil est maintenant haut dans le ciel et le même vent qui m'avait réchauffé cette nuit s'est transformé en une légère brise rafraîchissante. Arrivé au col, nous basculons sur l'avant dernière descente de cette course, ça sentirait presque la fin… deux coureurs arrivent derrière nous et nous dépassent nous déposant presque sur place. Mais, je connais ces chaussettes ! Je suis sûr que ceux qui viennent de nous doubler sont comme moi sur les 100 miles ! Je ne réfléchis même pas, je ne me ferai pas doubler a 15km de l'arrivé, et recolle immédiatement sur les deux coureurs. Alors que 2mn plus tôt j'arrivais à peine à avancer je dévale la descente sur La Vall filant le train à mes concurrents. L'histoire ne dira que plus tard que ces deux sympathiques personnes étaient en fait sur la 110 et que je n'avais donc aucune raison de me dépêcher … néanmoins ce petit coup de d’adrénaline m'avait fait l'effet d'une douche froide, j'étais de nouveau dans la course.

La mer à portée de main !!

J'arrive à La Vall en tête de notre trio et je pars seul du ravitaillement. Une montée, une descente et c'est fini. 400m de montée sur 1km, ça grimpe sec, si vous me permettez l'expression. Je m'appuie sur tous les arbres, m'accroche à chaque racine, pousse sur chaque rocher. A chaque fois que je touche quelque chose j'ai l'impression qu'elle bouge, que ma main s'enfonce à l’intérieur comme si la matière était devenue élastique, c'est donc ça les hallucinations dont parlent les traileurs coureurs de long.
Je bascule au col, maintenant elle est là, à portée de main, la mer. Ce n'est plus qu'une question de minutes, je dépasse le château de Valmy et les sentiers empruntés jusqu'alors laissent place à la route. J'augmente le rythme. Je me parle tout seul, c'est le moment de se libérer, d'oublier la douleur, d'oublier la fatigue et d'aller au bout.

Le port passé, je longe la plage. A ma droite j'entends les vagues catalanes se briser doucement sur le sable dans un rythme régulier ininterrompu. « Pas vite, mais tout le temps » je me suis répété cette phrase en boucle pendant les 31 dernières heures. Et elle m’amène maintenant a 50m de la ligne d'arrivée. Un dernier regard en arrière ; personne. C'est bon, un mètre avant la ligne je recommence à marcher, le speaker annonce mon nom ; Nicolas Couzinet de Saint Girons finisher des 100 miles en 31h48 5ème ! Je pose un pied derrière la ligne, j'ai terminé.



Nico sur le podium des 100 miles !
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